Mais je sais,
maintenant!
Rimbaud - Poesie Completes
<<Oh!
je ne me plains pas.
Je te dis mes betises,
C'est entre nous. J'admets que tu me contredises,
Or, n'est-ce pas joyeux de voir, au mois de juin
Dans les granges entrer des voitures de foin
Enormes? De sentir l'odeur de ce qui pousse,
Des vergers quand il pleut un peu, de l'herbe rousse?
De voir des bles, des bles, des epis pleins de grain,
De penser que cela prepare bien du pain. . .
Oh! plus fort, on irait, au fourneau qu'il s'allume,
Chanter joyeusement en martelant l'enclume,
Si l'on etait certain de pouvoir prendre un peu,
Etant homme, a la fin! de ce que donne Dieu!
<<Mais voila, c'est toujours la meme vieille histoire! . . .
Mais je sais, maintenant! Moi je ne peux plus croire,
Quand j'ai deux bonnes mains, mon front et mon marteau
Qu'un homme vienne la, dague sur le manteau,
Et me dise: Mon gars, ensemence ma terre;
Que l'on arrive encor, quand ce serait la guerre,
De prendre mon garcon comme cela, chez moi!
--Moi, je serais un homme, et toi, tu serais roi,
Tu me dirais: Je veux! . . . --Tu vois bien, c'est stupide.
Tu crois que j'aime voir ta baraque splendide,
Tes officiers dores, tes mille chenapans,
Tes palsembleu batards tournant comme des paons:
Ils ont rempli ton nid de l'odeur de nos filles
Et de petits billets pour nous mettre aux Bastilles
Et nous dirons: C'est bien; les pauvres a genoux!
Nous dorerons ton Louvre en donnant nos gros sous!
Et tu te souleras, tu feras belle fete.
--Et ces Messieurs riront, les reins sur notre tete!
<<Non. Ces saletes-la datent de nos papas!
Oh! Le Peuple n'est plus une putain. Trois pas
Et, tous, nous avons mis ta Bastille en poussiere.
C'est entre nous. J'admets que tu me contredises,
Or, n'est-ce pas joyeux de voir, au mois de juin
Dans les granges entrer des voitures de foin
Enormes? De sentir l'odeur de ce qui pousse,
Des vergers quand il pleut un peu, de l'herbe rousse?
De voir des bles, des bles, des epis pleins de grain,
De penser que cela prepare bien du pain. . .
Oh! plus fort, on irait, au fourneau qu'il s'allume,
Chanter joyeusement en martelant l'enclume,
Si l'on etait certain de pouvoir prendre un peu,
Etant homme, a la fin! de ce que donne Dieu!
<<Mais voila, c'est toujours la meme vieille histoire! . . .
Mais je sais, maintenant! Moi je ne peux plus croire,
Quand j'ai deux bonnes mains, mon front et mon marteau
Qu'un homme vienne la, dague sur le manteau,
Et me dise: Mon gars, ensemence ma terre;
Que l'on arrive encor, quand ce serait la guerre,
De prendre mon garcon comme cela, chez moi!
--Moi, je serais un homme, et toi, tu serais roi,
Tu me dirais: Je veux! . . . --Tu vois bien, c'est stupide.
Tu crois que j'aime voir ta baraque splendide,
Tes officiers dores, tes mille chenapans,
Tes palsembleu batards tournant comme des paons:
Ils ont rempli ton nid de l'odeur de nos filles
Et de petits billets pour nous mettre aux Bastilles
Et nous dirons: C'est bien; les pauvres a genoux!
Nous dorerons ton Louvre en donnant nos gros sous!
Et tu te souleras, tu feras belle fete.
--Et ces Messieurs riront, les reins sur notre tete!
<<Non. Ces saletes-la datent de nos papas!
Oh! Le Peuple n'est plus une putain. Trois pas
Et, tous, nous avons mis ta Bastille en poussiere.