Je me
souviens!
Baudelaire - Fleurs Du Mal
Avant que ton coeur ne se blase,
A la gloire de Dieu rallume ton extase;
C'est la Volupte vraie aux durables appas! >>
Et l'Ange, chatiant autant, ma foi! qu'il aime,
De ses poings de geant torture l'anatheme;
Mais le damne repond toujours; << Je ne veux pas! >>
LE JET D'EAU
Tes beaux yeux sont las, pauvre amante!
Reste longtemps sans les rouvrir,
Dans cette pose nonchalante
Ou t'a surprise le plaisir.
Dans la cour le jet d'eau qui jase
Et ne se tait ni nuit ni jour,
Entretient doucement l'extase
Ou ce soir m'a plonge l'amour.
La gerbe epanouie
En mille fleurs,
Ou Phoebe rejouie
Met ses couleurs,
Tombe comme une pluie
De larges pleurs.
Ainsi ton ame qu'incendie
L'eclair brulant des voluptes
S'elance, rapide et hardie,
Vers les vastes cieux enchantes.
Puis, elle s'epanche, mourante,
En un flot de triste langueur,
Qui par une invisible pente
Descend jusqu'au fond de mon coeur.
La gerbe epanouie
En mille fleurs,
Ou Phoebe rejouie
Met ses couleurs,
Tombe comme une pluie
De larges pleurs.
0 toi, que la nuit rend si belle,
Qu'il m'est doux, penche vers tes seins,
D'ecouter la plainte eternelle
Qui sanglote dans les bassins!
Lune, eau sonore, nuit benie,
Arbres qui frissonnez autour,
Votre pure melancolie
Est le miroir de mon amour.
La gerbe epanouie
En mille fleurs,
Ou Phoebe rejouie
Met ses couleurs,
Tombe comme une pluie
De larges pleurs.
LE COUCHER DU SOLEIL ROMANTIQUE
Que le Soleil est beau quand tout frais il se leve,
Comme une explosion nous lancant son bonjour!
--Bienheureux celui-la qui peut avec amour
Saluer son coucher plus glorieux qu'un reve!
Je me souviens! . . . J'ai vu tout, fleur, source, sillon,
Se pamer sous son oeil comme un coeur qui palpite,. .
--Courons vers l'horizon, il est tard, courons vite,
Pour attraper au moins un oblique rayon!
Mais je poursuis en vain le Dieu qui se retire;
L'irresistible Nuit etablit son empire,
Noire, humide, funeste et pleine de frissons;
Une odeur de tombeau dans les tenebres nage,
Et mon pied peureux froisse, au bord du marecage,
Des crapauds imprevus et de froids limacons.
LE GOUFFRE
Pascal avait son gouffre, avec lui se mouvant.
--Helas! tout est abime,--action, desir, reve,
Parole! et sur mon poil qui tout droit se releve
Mainte fois de la Peur je sens passer le vent.
En haut, en bas, partout, la profondeur, la greve,
Le silence, l'espace affreux et captivant. . .
Sur le fond de mes nuits Dieu de son doigt savant
Dessine un cauchemar multiforme et sans treve.
A la gloire de Dieu rallume ton extase;
C'est la Volupte vraie aux durables appas! >>
Et l'Ange, chatiant autant, ma foi! qu'il aime,
De ses poings de geant torture l'anatheme;
Mais le damne repond toujours; << Je ne veux pas! >>
LE JET D'EAU
Tes beaux yeux sont las, pauvre amante!
Reste longtemps sans les rouvrir,
Dans cette pose nonchalante
Ou t'a surprise le plaisir.
Dans la cour le jet d'eau qui jase
Et ne se tait ni nuit ni jour,
Entretient doucement l'extase
Ou ce soir m'a plonge l'amour.
La gerbe epanouie
En mille fleurs,
Ou Phoebe rejouie
Met ses couleurs,
Tombe comme une pluie
De larges pleurs.
Ainsi ton ame qu'incendie
L'eclair brulant des voluptes
S'elance, rapide et hardie,
Vers les vastes cieux enchantes.
Puis, elle s'epanche, mourante,
En un flot de triste langueur,
Qui par une invisible pente
Descend jusqu'au fond de mon coeur.
La gerbe epanouie
En mille fleurs,
Ou Phoebe rejouie
Met ses couleurs,
Tombe comme une pluie
De larges pleurs.
0 toi, que la nuit rend si belle,
Qu'il m'est doux, penche vers tes seins,
D'ecouter la plainte eternelle
Qui sanglote dans les bassins!
Lune, eau sonore, nuit benie,
Arbres qui frissonnez autour,
Votre pure melancolie
Est le miroir de mon amour.
La gerbe epanouie
En mille fleurs,
Ou Phoebe rejouie
Met ses couleurs,
Tombe comme une pluie
De larges pleurs.
LE COUCHER DU SOLEIL ROMANTIQUE
Que le Soleil est beau quand tout frais il se leve,
Comme une explosion nous lancant son bonjour!
--Bienheureux celui-la qui peut avec amour
Saluer son coucher plus glorieux qu'un reve!
Je me souviens! . . . J'ai vu tout, fleur, source, sillon,
Se pamer sous son oeil comme un coeur qui palpite,. .
--Courons vers l'horizon, il est tard, courons vite,
Pour attraper au moins un oblique rayon!
Mais je poursuis en vain le Dieu qui se retire;
L'irresistible Nuit etablit son empire,
Noire, humide, funeste et pleine de frissons;
Une odeur de tombeau dans les tenebres nage,
Et mon pied peureux froisse, au bord du marecage,
Des crapauds imprevus et de froids limacons.
LE GOUFFRE
Pascal avait son gouffre, avec lui se mouvant.
--Helas! tout est abime,--action, desir, reve,
Parole! et sur mon poil qui tout droit se releve
Mainte fois de la Peur je sens passer le vent.
En haut, en bas, partout, la profondeur, la greve,
Le silence, l'espace affreux et captivant. . .
Sur le fond de mes nuits Dieu de son doigt savant
Dessine un cauchemar multiforme et sans treve.